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L’Onusida estime que le nombre de personnes vivant avec le VIH s’élèvera à 33 millions fin 2009. À cette même date, au moins 70 % des personnes qui auraient besoin d’un traitement n’y auront pas accès. Les premiers responsables ? Les grands laboratoires de marques, qui imposent des prix exorbitants et s’opposent à la concurrence des génériques, mais aussi les pays riches, parmi lesquels la France, dont les contributions financières à la lutte contre le sida dans les pays du Sud restent totalement insuffisantes, et qui font pression pour que les pays pauvres n’aient pas recours aux médicaments génériques.

En 2009, au moins 70 % des personnes vivant avec le VIH n’ont toujours pas accès aux soins qui leur sauveraient la vie. C’est certes un progrès, comparé aux 95 % des personnes privées de traitement en 2001 – progrès qui n’a été possible que grâce à l’augmentation des contributions des pays riches à la lutte contre le sida. Mais ce progrès reste insuffisant pour atteindre l’accès universel aux traitements. Le sida tue 6 000 personnes par jour. 15 000 personnes meurent quotidiennement à cause du VIH, du paludisme et de la tuberculose.

Outre l’engagement financier insuffisant des pays riches, l’un des obstacles à l’accès aux médicaments dans les pays pauvres reste leur coût, trop élevé. C’est notamment le cas des médicaments contre le VIH dits de « seconde ligne », développés dans les années 1990. Ces médicaments sont beaucoup plus coûteux que ceux de première génération. Ils sont pourtant indispensables, car les personnes développent rapidement des résistances aux médicaments, et ont besoin de traitements de nouvelles générations. Les médicaments de première génération sont arrivés en France il y a 15 ans, or ils sont en général plus toxiques et présentent des risques de résistance aggravés.

Les accords ADPIC/TRIPS sur la propriété intellectuelle ont prévu des flexibilités au système des brevets, notamment les licences obligatoires, pour permettre aux pays pauvres d’importer ou de produire des médicaments génériques, beaucoup moins chers, et de soigner l’ensemble de leurs malades, et non pas les seules personnes qui peuvent se payer les médicaments de marques. Dans les faits, ces flexibilités sont très peu utilisées par les pays, par peur des mesures de représailles exercées par l’industrie pharmaceutique, mais aussi par les États-Unis ou l’Europe.

Act Up-Paris au travail

Dès le début des années 1990, Act Up-Paris a milité pour l’accès aux médicaments dans les pays du Sud, dans un contexte où gouvernements des pays riches et institutions internationales pensaient qu’il s’agissait d’une « utopie » et y opposaient la prévention. Pendant des années, les pays riches ont laissé crever des malades du sida, notamment en Afrique, parce qu’ils ne pensaient qu’à la prévention.

En 20 ans, Act Up-Paris a contribué à mettre en avant la question des traitements et à montrer qu’il fallait articuler prévention et accès aux soins, et non les opposer. Depuis 1992, la commission internationale de l’association travaille autour de trois axes complémentaires :

  • Le financement de la lutte contre le sida, notamment par les pays riches (entre autre par le biais du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme créé en 2001, et d’Unitaid depuis 2006). En 2002, après une campagne de zaps sur le gouvernement socialiste et le Premier ministre Lionel Jospin, nous avons obtenu un triplement de la contribution française au Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme. Cette contribution a augmenté régulièrement jusqu’en 2007 et l’élection de Nicolas Sarkozy, qui a décidé de la geler, et de diminuer l’Aide Publique au Développement en santé, rompant avec les promesses de la France d’assurer l’accès universel aux traitements d’ici 2010.

Aujourd’hui, à l’initiative d’Act Up-Paris, une nouvelle campagne d’affichage internationale a été lancée par plus de 80 associations partenaires, de 37 pays différents. Re-Mind the gap appelle les pays riches et notamment la France à augmenter d’urgence leur contribution financière au Fonds mondial. En effet, l’objectif pour 2010 des pays du G8 de permettre un accès universel aux traitements est fortement remis en cause du fait de la crise financière mondiale. Il manque plus de 5 milliards de dollars au Fonds, d’ici novembre, pour assurer les programmes déjà existants.

  • L’accès à des médicaments à bas prix et la liberté de recourir aux médicaments génériques Dès 1997, nous avons été les premierEs à poser publiquement l’accès aux génériques comme une étape indispensable pour faire baisser les prix des traitements, les rendre accessibles aux malades des pays du Sud, à promouvoir les flexibilités sur les brevets, notamment les licences obligatoires, prévues par les accords TRIPS/ADPIC sur la propriété intellectuelle.

Il était nécessaire de révéler la politique criminelle de l’industrie de marque, et l’illégitimité de son monopole sur les brevets face aux milliers de mortEs quotidiens liéEs au manque de traitements. Depuis 1998, les stands des laboratoires pharmaceutiques aux conférences internationales sont systématiquement zappés, des bureaux et des usines fermés, un travail de communication internationale accompli. Nous avons ainsi contribué à dégrader l’image de« Big Pharma ».

Suite à une campagne d’ampleur menée par Act Up-Paris et ses partenaires, la déclaration de Doha, signée en 2001 par l’ensemble des pays de l’OMC, clarifie le droit des pays à produire et importer des génériques en cas de crise sanitaire grave.

Nous nous opposons dès que nous le pouvons aux pressions exercées par l’industrie pharmaceutique pour maintenir des prix exorbitants dans des pays gravement touchés, comme lors du procès de Pretoria en 2001, comme dans l’affaire Abbott en Thaïlande en 2006. Nous militons aussi contre les accords bilatéraux signés entre les États-Unis et certains pays, comme au Maroc en 2004 , en Thaïlande la même année , ou contre les modifications de l’ordonnance sur les brevets en Inde, premier pays producteur et exportateur de génériques .

  • Le développement de l’activisme dans les pays du Sud, parce que renforcer des structures de plaidoyer dans les pays en développement permet aux militantEs de porter les revendications qui sont les leurs, sans qu’elles soient imposées par leurs partenaires extérieurs. De 1997 à 2002, Act Up-Paris créé et soutient Planet Africa, un réseau de partenaires en Afrique. Act Up-Paris les équipe en ordinateurs et en accès Internet afin de favoriser les échanges entre les pays du Nord et les pays du Sud.

Aujourd’hui, le projet Plaidoyer Sud porté par Act Up, Solidarité Sida et Aides vise à renforcer les structures d’associations africaines afin qu’elles mettent en place leur propre action de plaidoyer.

Act Up-Paris exige

– Une augmentation radicale de la contribution des pays riches pour le financement de la lutte contre le sida dans les pays du Sud. En dépit de la crise financière, le financement de la lutte contre le sida doit être une priorité et l’accès universel aux médicaments promis par les pays riches effectif dès 2010.

– L’organisation par la France d’un sommet de chefs d’États africains pour promouvoir l’émission de licences obligatoires, donc la production et l’importation de médicaments génériques à bas prix.

– La baisse des prix sur les traitements de seconde ligne, que seule la concurrence des génériques pourra assurer.