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Le 14 novembre 2001, la conférence ministérielle de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), réunie à Doha (Qatar), adoptait une « Déclaration sur la propriété intellectuelle et la santé » [[Voir le document sur le site : www.wto.org.]]. Selon les termes de cette déclaration, les pays en développement étaient autorisés à contourner les monopoles liés aux brevets, lorsque cela est nécessaire pour assurer l’accès aux médicaments pour l’ensemble de leurs populations.

Cinq ans après, selon des chiffres de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), 74% des médicaments anti-sida sont sous monopole[[Voir le document sur le site : www.who.int et notre document pdf disponible sur cette page.]] et 77% des AfricainEs n’ont toujours pas accès aux traitements antirétroviraux [[ [Voir le document sur le site : www.who.int. ]] . Aux Philippines, en Indonésie, au Niger, au Bostwana et en Haïti, il n’y a toujours aucun générique disponible [[<2>]] en 2006, alors même que plus de 8 molécules antirétrovirales différentes existent dans ces pays – uniquement des médicaments de marque. L’article 5(b) de la Déclaration de Doha affirmait pourtant que « Chaque état membre de l’OMC a le droit d’accorder des licences obligatoires, et la liberté de déterminer les motifs pour lesquels de telles licences sont accordées ». A la différence d’une licence volontaire (que le propriétaire du brevet octroie de lui-même), la licence obligatoire est décidée par le gouvernement d’un Etat sans l’accord du propriétaire. Mais force est de constater que le recours à ces licences est en pratique extrêmement rare. « L’utilisation de la Déclaration de Doha est quasiment impossible, du fait des pressions politiques exercées par l’administration Bush », affirme le Dr Pedro Chequer[[Pedro Chequer, chequerp@unaids.org, +54 11 4314 2376 ; déclaration de Pedro Chequer à Act Up-Paris sur la tentative avortée du Brésil d’utiliser la Déclaration de Doha : en conclusion du dossier de presse.]], qui dirigeait jusque fin 2005 le Programme national brésilien de lutte contre le sida. « C’est exactement ce qui est arrivé au Brésil l’année dernière, quand nous avons tenté d’utiliser les licences obligatoires, disposition pourtant prévue dans la Déclaration de Doha ». « Chez Cipla, jusqu’ici nous avons été en mesure de fabriquer des versions génériques des médicaments VIH datant d’avant l’OMC et la mondialisation des brevets » rappelle le Dr Yusuf Hamied, PDG des laboratoires Cipla.[[ Yusuf Hamied, corporate@cipla.com, +91 98 2029 8765 ; communiqué de Cipla sur les problèmes posés par la Déclaration de Doha : voir le document pdf disponible sur cette page.]] « Mais, si la Déclaration de Doha reste lettre morte, les génériqueurs comme Cipla seront incapables de proposer des versions bon marché des dernières innovations anti-VIH — par exemple les très prometteurs inhibiteurs d’intégrase — car ces médicaments récents sont brevetés partout dans le monde ». Face à l’échec de la Déclaration de Doha, Act Up-Paris appelle Jacques Chirac à ne plus se contenter de vagues déclarations mais à dénoncer explicitement les Etats-Unis pour les pressions qu’ils exercent contre les pays qui souhaitent mettre la Déclaration de Doha en application. Act Up-Paris exige aussi des candidatEs à l’élection présidentielle qu’ils s’engagent à ce qu’en 2007 la France se prononce contre l’application des droits de propriété intellectuelle relatifs aux produits de santé dans les pays en développement.

Documents de référence

– 1. Tableau brut de l’OMS listant les ARV disponibles dans chaque pays en développement ; – 2. Analyse du tableau brut de l’OMS faisant apparaître, pour chaque pays, le nombre d’ARV disponibles, le nombre d’ARV sous concurrence/monopole, et le pourcentage résultant ; – 3. Définitions et méthodologie relative à l’analyse du tableau brut de l’OMS ; – 4. Communiqué de presse des laboratoires génériques Cipla à l’occasion du 5ème anniversaire de la Déclaration de Doha. Ces documents sont disponible ici.

Sommaire du dossier


Accès aux médicaments et brevets : les bases pour comprendre

1. Qu’est-ce qu’un brevet ? Un brevet est un titre de propriété qui porte non pas sur un terrain ou une entreprise, mais sur une invention. De même qu’un état étranger ne peut pas émettre un titre de propriété foncière pour un terrain en France, la France ne peut pas émettre un brevet pour l’exploitation d’une invention à l’étranger. Les brevets sont des titres de propriété strictement nationaux : il faut en déposer un dans chaque pays où l’on souhaite l’exercer. 2. Comment fonctionne un brevet ? Un brevet sert à obtenir un monopole sur l’exploitation d’une invention. Le monopole conféré par un brevet se matérialise par le droit exclusif de fabriquer et de commercialiser l’invention brevetée. Ces droits exclusifs permettent au propriétaire d’un brevet de poursuivre en justice toute personne ou entreprise qui aurait fabriqué ou commercialisé l’invention sans l’accord du propriétaire. Dans ce cas, le contrefacteur sera condamné à rembourser le propriétaire du brevet pour les pertes commerciales encourues. Les brevets assurent des monopoles aux entreprises, les rétribuant ainsi de leurs investissements en Recherche et Développement (R&D). L’existence d’un monopole, parce qu’il protège de la concurrence, permet à l’entreprise qui le détient de déterminer le prix auquel elle vendra le produit, souvent à un prix élevé puisqu’elle ne peut pas perdre de parts de marché. L’entreprise peut ainsi engranger des recettes importantes et espérer maximiser ses profits. 3. Quels problèmes les brevets posent-ils pour l’accès aux médicaments ? Les brevets ont pour objet de favoriser la fixation de prix particulièrement élevés, c’est à dire très éloignés du coût marginal de fabrication (qui correspond au coût de fabrication d’une unité supplémentaire). Ainsi, la lamivudine (le médicament anti-VIH le plus commun) coûte moins de 43 euros à fabriquer (prix générique pour un an de traitement), mais est vendu par le laboratoire Glaxo-SmithKline 1 730 euros HT (prix annuel en France). La marge réalisée par le laboratoire grâce à son monopole lui permet de rentabiliser ses investissements passés et d’investir pour des recherches à venir. En France, une trithérapie typique (lamivudine + ténofovir + efavirenz) coûte 8 500 euros par an. La France dispose toutefois d’un régime de protection sociale qui prend en charge à 100 % l’infection au VIH. Ainsi, en France, le prix exorbitant des antirétroviraux n’empêche pas les malades d’avoir accès aux traitements. Mais dans les pays pauvres, ces systèmes de protection sociale n’existent pas. Et même s’il y en avait, les pays pauvres ne disposeraient tout simplement pas des sommes suffisantes pour payer de tels prix (au Malawi, 10% de la population totale est séropositive, alors que le PIB par habitantE est inférieur à 400 euros). Ainsi, les laboratoires occidentaux réalisent une part infime de leurs ventes dans les pays pauvres : à ces prix, et sans assurance maladie, seule une infime minorité de la population est en mesure de se procurer les médicaments. Dans les pays pauvres, chaque euro supplémentaire ajouté au prix d’un antirétroviral prive une tranche supplémentaire de la population malade de la possibilité d’accéder au traitement. Grâce à la concurrence qui s’exerce dans certains pays où la lamivudine n’est pas sous brevet, comme l’Inde, le prix de la lamivudine générique a pu être divisé par deux depuis 2001 (80 à 43 euros). Dans les pays pauvres, la concurrence sur les médicaments est indispensable pour assurer l’accès du plus grand nombre de malades possible aux médicaments dont ils et elles ont besoin. 4. Qu’est-ce qu’une licence obligatoire ? Une licence est ce qui permet à une personne autre que le propriétaire du brevet de fabriquer ou commercialiser l’invention brevetée, en échange du paiement d’une redevance au propriétaire (en général un pourcentage du prix du produit). Contrairement à une licence dite « volontaire » (c’est à dire concédée volontairement par le propriétaire), une licence obligatoire est un instrument juridique qui permet au gouvernement d’un pays de lever d’autorité le monopole qui existe sur un produit. Le bénéficiaire d’une licence obligatoire doit lui aussi payer une redevance au propriétaire du brevet. 5. Qu’est-ce que l’ADPIC ? L’ADPIC est l’Accord sur les Droits de Propriété Intellectuelle liés au Commerce. C’est l’un des accords de l’OMC, signés à Marrakech en 1994 (les autres accords touchent, par exemple, au commerce des produits agricoles, au commerce des produits manufacturés, au commerce des services, etc.) L’article 31 de l’ADPIC énonce les règles que les Etats Membres de l’OMC doivent suivre afin d’utiliser les licences obligatoires et de lever un brevet. 6. Qu’est-ce que la Déclaration de Doha sur les ADPIC et la Santé ? La Déclaration de Doha est une décision de la Conférence ministérielle de l’OMC (c’est à dire le plus haut niveau de décision possible à l’OMC) sur la propriété intellectuelle et l’accès aux produits de santé. Elle faisait suite au constat, par la communauté internationale, que les prix des antirétroviraux de marque dans les pays en développement obéraient toute possibilité d’accès aux soins pour les malades du sida, et qu’il était moralement inacceptable que les brevets empêchent les malades d’Afrique d’accéder aux versions génériques bon marché des antirétroviraux produites en Inde. L’article 4 de la Déclaration de Doha affirme la prééminence des enjeux sanitaires sur les enjeux purement commerciaux (« l’ADPIC devrait être mis en œuvre d’une manière qui appuie le droit des Membres de l’OMC de protéger la santé publique et, en particulier, de promouvoir l’accès de tous aux médicaments »). L’article 5(b) de la Déclaration de Doha rappelle que les Etats Membres ont toute latitude pour utiliser les licences obligatoires (« Chaque Membre a le droit d’accorder des licences obligatoires et la liberté de déterminer les motifs pour lesquels de telles licences sont accordées »). Ainsi, la Déclaration de Doha invitait clairement les pays pauvres à recourir aux licences obligatoires lorsque cela s’avère nécessaire pour baisser les prix des médicaments.

Cinq ans après Doha : 75% des ARV toujours sous monopole

Signé en 2001, l’accord de l’OMC à Doha sur les brevets pharmaceutiques était censé permettre de lever les monopoles qui s’opposent à la diffusion des médicaments génériques dans les pays pauvres – en particulier pour les antirétroviraux. Or, cinq après, il apparaît que près de 75% des antirétroviraux sont toujours sous monopole dans les pays pauvres. En effet, l’OMS publie désormais sur internet la liste des antirétroviraux brevetés et génériques disponibles dans chaque pays[[Les détails de la méthodologie employée pour analyser la base de donnée de l’OMS (www.who.int/hiv/amds/patents_registration/drs/) sont disponibles sur cette page.]]. A partir de cette liste, il est possible de connaître le nombre d’antirétroviraux qui sont soumis à la concurrence et de ceux qui sont soumis à un monopole. Act Up-Paris a conduit une analyse de ces données en octobre 2006[[<6>]]. Ainsi, au Niger, l’OMS compte 8 molécules antirétrovirales (ARV) différentes disponibles. Mais sur ces 8 ARV, aucune n’est disponible en générique – alors que des versions génériques moins chères et de qualité prouvée existent pour 7 de ces médicaments. Ainsi, les malades du sida les plus pauvres se retrouvent excluEs de l’accès au traitement, et la facture pharmaceutique du Niger grève sans raison les réserves de devises. Malheureusement, la base de données de l’OMS montre que la situation du Niger est loin d’être isolée :
Pays Nombre d’ARV différents disponibles[[<6>]] Nombre d’ARV soumis à la concurrence[[Est considéré comme soumis à la concurrence un ARV pour lequel il existe au moins un générique dans le pays, voir note méthodologique, dans cette page.]] Ratio « Taux de concurrence »
Bostwana 12 0 0/12 0 %
Pakistan 10 0 0/10 0 %
Rwanda 7 0 0/7 0 %
Togo 11 4 4/11 36 %
Vietnam 10 1 1/10 10 %
D’une manière générale, l’analyse des données de l’OMS montre la très grande prééminence des médicaments brevetés sur les génériques : sur l’ensemble de la base, seul 26,40 % des antirétroviraux sont exposés à la concurrence[[<6>]] – soit à peine un produit sur 4. Ce chiffre est encore plus choquant quand on limite l’analyse aux 54 pays les plus pauvres (classification Banque mondiale). Le taux de concurrence dans ces pays est limité à 25,80 %, alors qu’il devrait approcher les 100 % si les accords de Doha avaient trouvé une application effective. Ainsi, il apparaît que, malgré la Déclaration de Doha, les pays en développement ne réussissent toujours pas à accéder aux génériques d’antirétroviraux, ni à faire jouer la concurrence pour obtenir des baisses de prix supplémentaires. La Déclaration de Doha n’a pas permis de générer l’accès aux médicaments promis : l’OMC doit revoir sa copie.

Accès aux médicaments : Ce que la France peut faire

1. L’émission de licences obligatoires : sortir de l’impasse. Les Etats-Unis font pression sur les gouvernements des pays en développement (PED) pour empêcher la mise en pratique des accords de l’OMC censés permettre aux PED d’avoir accès à des versions génériques de médicaments sous brevet. Ces pressions s’exercent soit par le biais d’expressions verbales non-publiques de responsables officiels américains, soit par la signature avec des PED d’accords commerciaux bilatéraux qui incluent des clauses bloquant l’application de l’accord de Doha sur les licences obligatoire[[Voir les explications de ces clauses, chapître suivant.]]. Aucun PED ne veut évidemment être le premier à braver Washington en émettant une licence obligatoire autorisant l’importation de génériques indiens ou brésiliens. Entre les génériqueurs et les PED, la situation est tout aussi sclérosée. Les génériqueurs ne veulent pas investir dans le développement de versions génériques de produits déjà brevetés avant d’être sûrs que ces génériques pourront effectivement être commercialisés, c’est-à-dire pas avant que les PED n’aient émis les licences d’office nécessaires. Mais de l’autre côté, aucun gouvernement de PED ne veut émettre une licence obligatoire pour l’importation d’un produit tant que ce produit n’a pas encore été mis au point par les génériqueurs. De plus, les génériqueurs, pour espérer rentabiliser leurs investissements, ont besoin de gros volumes et de larges marchés. Or, aucun PED ne représente, à lui seul, un marché suffisant pour justifier le développement d’un nouveau générique. C’est pourquoi les génériqueurs ont besoin que plusieurs pays émettent des licences d’office sur les mêmes médicaments avant de pouvoir rationnellement investir dans le développement de leurs versions génériques. Concrètement, la France peut prendre l’initiative de réunir les ministres de l’industrie et de la santé des pays en développement déterminéEs à faire usage à court terme des licences d’office et autres flexibilités obtenues à l’OMC. Cette réunion devra s’achever par l’émission simultanée, par les pays présents, de licences pour l’importation de médicaments génériques. L’organisation de cette réunion internationale permettrait notamment de : – Renforcer la capacité des pays en développement à faire front commun contre Washington sur la question de l’application de l’Accord de Doha. – Ouvrir à la concurrence une part importante du marché international des antirétroviraux ce qui entrainera une baisse générale des prix des génériques. – Inciter les génériqueurs à s’engager sur un calendrier précis de développement de versions génériques des antirétroviraux les plus utiles et les moins abordables. – Crédibiliser les décisions prises au niveau de l’OMC en matière d’accès aux médicament, en transformant les engagements sur le papier en de réelles avancées. 2. La Déclaration de Doha : une base minimale de négociation. La Déclaration de Doha se contente de préciser certaines « marges de manoeuvre » permises par l’ADPIC en matière de Droits de propriété intellectuelle en santé (DPIS) ; elle n’oblige évidemment pas les Etats à y recourir. Les Etats-Unis exploitent donc cette faille depuis 2001. C’est ainsi qu’ils imposent aux PED avec lesquels ils signent des accords commerciaux bilatéraux des restrictions de DPIS largement plus importantes que celles prévues par l’ADPIC (et donc dites « ADPIC+ »). Ces dispositions abusives sont principalement de deux ordres : – a) elles instituent de nouvelles formes de DPIS non-prévues dans l’ADPIC – des formes de DPIS qui, à la différence des brevets, ne peuvent pas être levées en cas d’urgence sanitaire[[Ces nouveaux monopoles passent non plus par les brevets, mais par les autorisations sanitaires de commercialisation des médicaments (un médicament ne peut pas être commercialisé sans autorisation de l’Agence du Médicament, chargée d’en vérifier la qualité). Les accord bilatéraux des Etats-Unis exigent que les pays pauvres interdisent à leur agence nationale de donner aux génériques des autorisations de mise sur le marché. Ceci crée un nouveau monopole pour le produit breveté – mais ce monopole ne provient pas du brevet. Ainsi, même en cas de licence obligatoire sur le brevet, ce nouveau monopole continue de s’appliquer.]] ; – b) elles réduisent la capacité des PED à émettre des licences obligatoire[[Pour plus de détails sur comment les Etats-Unis s’y prennent, dans leurs accords bilatéraux, pour bloquer l’application des flexibilités de l’ADPIC qui furent pourant consacrées dans la Déclaration de l’OMC à Doha, voir l’excellent rapport minoritaire du Congrès americain.]]. En imposant dans ces accords des clauses qui bloquent la Déclaration de Doha, les Etats-Unis envoient un signal politique fort à tous les PED quant à leur opposition totale à ce qu’ils utilisent leur droit d’accéder aux médicaments génériques. Ce signal, couplé aux interventions directes des ambassadeurs américains auprès des gouvernements des pays pauvres, est extrêmement efficace pour stopper toute velléité d’appliquer la Déclaration de Doha. Concrètement, la France peut déposer au Conseil européen des ministres du commerce extérieur, puis à l’OMC, une proposition de Décision du Conseil Général de l’OMC par laquelle les Etats Membres s’engageraient à : – Etendre aux accords commerciaux bilatéraux le principe selon lequel, en matière de DPIS, les pays en développement ne doivent en aucun être liés à des obligations supérieures à celles de l’ADPIC. – Mettre fin à l’inclusion de toute disposition relative aux DPIS dans les accords commerciaux bilatéraux signés avec des Etats Membres en développement. – Renoncer, au profit de l’OMC, à la résolution purement bilatérale de tout différend lié à une disposition DPIS d’un accord commercial bilatéral signé avec un Membre en développement. Le dépôt de cette proposition de Décision du Conseil Général de l’OMC permettrait de : – Créer un débat public sur la légitimité des dispositions DPIS-ADPIC+ des accords signés par les Etats-Unis depuis Doha. – Renforcer la capacité des pays en développement qui négocient des accords avec les Etats-Unis pour leur permettre de refuser d’inclure les DPIS dans la négociation et pour les soutenir dans le recours aux flexibilités sanitaires de l’ADPIC. – Corriger le signal politique négatif envoyé par la France et l’Union Européenne aux PED, en octobre 2005, qui se sont opposées à la demande formulée par l’Union Africaine à l’OMC pour que les procédures d’exportation de génériques soient simplifiées. – Lorsque la Décision sera adoptée par l’OMC, elle permettra d’assurer la pleine applicabilité de la Déclaration de Doha, si chèrement négociée en 2001, et qui est actuellement en voie de destruction par les accords de libre échange américains. 3. Faciliter l’exportation de médicaments génériques vers des pays en développement. Un règlement européen de 2005 institue une procédure par laquelle les fabricants européens de médicaments génériques peuvent obtenir une autorisation pour fabriquer et exporter des versions génériques de médicaments sous brevet à des fins humanitaires, vers des pays en difficulté. Mais de l’avis même des industriels européens du générique[[Voir le position paper de l’European Generics Association sur ce sujet sur le site : www.egagenerics.com.]], cette procédure est si contraignante et si juridiquement incertaine, qu’ils n’exportent pas de génériques vers les pays pauvres en crise sanitaire. L’OMC a imposé la même procédure à l’Inde et aux pays qui fabriquent des génériques à bas prix, avec le même résultat : l’abandon par les industriels des projets de production humanitaire (voir le communiqué du laboratoire indien Cipla à ce sujet, sur cettte page.). Concrètement, la France peut amender l’article L613-5 du Code de la Propriété intellectuelle afin d’y intégrer la possibilité, pour des industriels français, d’exporter des médicaments génériques bon marché vers les pays qui en ont besoin. Il s’agirait d’ajouter comme suit la disposition d) à l’article Les droits conférés par le brevet ne s’étendent pas : – a) Aux actes accomplis dans un cadre privé et à des fins non-commerciales ; – b) Aux actes accomplis à titre expérimental qui portent sur l’objet de l’invention brevetée ; – c) A la préparation de médicaments faite extemporanément et par unité dans les officines de pharmacie, sur ordonnance médicale, ni aux actes concernant les médicaments ainsi préparés. – d) Aux actes accomplis à titre humanitaire dans le cadre de l’exportation de médicaments vers un pays en développement, à l’invitation de celui-ci. Cette nouvelle disposition offrirait aux industriels français la possibilité d’exporter des génériques vers l’Afrique et encouragerait l’Inde à adopter une disposition similaire dans son droit national (garantissant ainsi que les génériqueurs indiens continueront à fabriquer des versions génériques des plus récents médicaments anti-sida et à les exporter vers l’Afrique). Déclaration de Pedro Chequer
Directeur national du programme national brésilien de lutte contre le sida en 2004-2005
Déclaration de Pedro Chequer à Act Up – Paris à l’occasion du 5ème anniversaire de la déclaration de Doha (Organisation Mondiale du Commerce) sur les Accords Généraux sur le Commerce des Services et la Propriété Intellectuelle. Novembre 2006. « La concurrence des trithérapies génériques de première génération a réduit le coût moyen d’un traitement annuel. Néanmoins, du fait de l’obsolescence de ces médicaments et de l’arrivée de traitements nouveaux et plus performants (tous brevetés), ce scénario se trouve modifié, et les prix ont augmenté significativement. Au Brésil, par exemple, le coût moyen est passé de 1 300 dollars en 2003 à 2 500 en 2005. Ces augmentations des prix vont évidemment se produire dans un futur proche dans tous les pays qui commencent à utiliser des trithérapies. Cela peut mettre en danger la possibilité d’une couverture universelle. En 2005, le Brésil était techniquement en mesure de produire des versions génériques, bon marché, de traitements antirétroviraux de deuxième génération brevetés, et la décision d’emettre une licence obligatoire était à un stade avancé. Cependant, à cause de pressions politiques et de menaces de représailles économiques par l’administration Bush, l’adoption d’une licence obligatoire fut abandonnée et remplacée par une négociation de prix. En dépit de l’ADPIC et de la déclaration de Doha, l’adoption de licences obligatoires est quasiment impossible en pratique. Et ce du fait de plusieurs facteurs, tels que : l’absence de décision politique nationale, l’absence de capacités de production au niveau local dans de nombreux pays en développement, et les pressions politiques et les menaces de représailles économiques. »

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